É uma leitura que muito se recomenda, e particularmente no dia em que se assinala o 65.º aniversário da libertação de Auschwitz, o texto “La nouvelle condition humaine d'après Auschwitz”, da autoria do grande rabino de França, Gilles Bernheim, publicado no diário Le Figaro.
Dois extractos:
“Reprenant ici très fidèlement une réflexion orale amorcée un jour par Émile Touati, on peut se demander si, soixante-cinq ans après, le monde actuel est meilleur, plus civilisé ou simplement plus lucide que celui de l'avant-guerre. Du double programme de la moralité active : combattre le mal et faire le bien, on n'a réalisé (et encore très partiellement et très imparfaitement) que la première partie. Le nazisme, expression du mal absolu, a heureusement été vaincu, mais non éradiqué. Cependant, les grandes illusions de 1945 ont été rapidement déçues. La création de l'ONU, du Fonds monétaire international, les accords de Bretton Woods faisaient espérer un nouvel ordre international, politique, économique et financier, tandis que les promoteurs du Welfare State promettaient une société plus juste, débarrassée du spectre du chômage. À cet égard, force est d'enregistrer un bilan de faillite quasi général. Les conflits nationalistes, idéologiques, ethniques ou tribaux sévissent un peu partout et ne sont pas résolus. Le terrorisme international, cancer de notre époque, constitue pour certains une « contre- société » potentielle dans laquelle la mort - ou le retour au néant paradisiaque - représente le seul refuge contre le mal. Quant à l'économie mondiale, elle semble vouée aux déséquilibres, aux crises, aux spéculations sans frein et à l'élimination des plus faibles.”
“Nous vivons à l'ère des ingénieurs - une ère plus préoccupée par le souci d'innover que de comprendre l'événement. C'est une époque de transformation radicale, réfractaire, comme souvent en pareil cas, à l'histoire. À cet égard, ce que l'humanité doit aussi comprendre d'Auschwitz, c'est qu'elle doit adopter une position de plus grande réserve face à la civilisation performante et triomphante qui nous a trahis hier. Une position d'homme face au monde, faite sinon de méfiance, au moins de discernement et d'une adhésion mesurée aux réussites, aux ors brillants et aux leurres de toutes sortes. Notre époque est aussi celle du dénombrement, des statistiques, de la réduction du divers au semblable - ce qui aboutit aux amalgames et à la confusion. La parole de Jérémie est, elle, le cri de l'individu singulier en sa souffrance à nulle autre pareille, opposable à jamais à toutes les tentatives idéologiques de compensation ou de comparaison des souffrances, à ces comptabilités démentes qui voudraient que des victimes rachètent ou effacent d'autres victimes, ou qu'elles soient en compétition les unes avec les autres.”
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